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Il a introduit dans l'espace romanesque les plus mystérieux des mystères: ceux qui se cachent derrière nos propres portes. Cet éloge du grand Henry James s'adresse à un maître de l'intrigue, Wilkie Collins, considéré aujourd’hui comme le précurseur de la «detective novel» anglaise.
 
Sa carrière littéraire avait pourtant bien mal débuté. Après une enfance solitaire marquée par l’autorité étouffante de son père, le peintre paysagiste William Collins, Wilkie Collins est fermement poussé vers une carrière juridique. A la mort de ce père en 1847, le jeune écrivain, afin de pouvoir toucher sa part d’héritage, est contraint par testament de rédiger la biographie hagiographique du mort et de la publier à compte d’auteur... Son devoir accompli, il se tourne résolument vers l’écriture. De ses études de droit (tout de même sanctionnées par un titre d’avocat en 1851) il gardera le goût des grandes affaires criminelles et des mécanismes de la procédure judiciaire; d’une éducation tyrannique, des troubles nerveux qu’il tentera d’apaiser à fortes doses de laudanum.
 
En 1855, il a intégré la revue Household Words animée par son beau-frère Charles Dickens avec lequel il partage une passion commune pour le théâtre. Mais jusqu’à cette date, ses tentatives littéraires n’ont connu qu’un succès d’estime; quelques nouvelles et trois romans: Antonia ou la chute de Rome, Basil et Monkton le Fou;  histoires d’amour, de haine et de vengeance où transparaissent déjà ses qualités de narrateur.
 
Une nuit d’été 1855, Wilkie Collins, son frère Charles et le peintre préraphaélite J. E. Millais sont en promenade dans Londres. A la grille d'une grande maison de Regent's Park, une jeune femme en blanc, très belle, les supplie de lui venir en aide avant de disparaître. Fasciné Collins mène l’enquête pour découvrir que son apparition, Caroline Graves est séquestrée avec son bébé par un mari à demi-fou. Il la délivre et devient son amant jusqu’à sa mort en 1889. Ce qui aurait pu rester un fait divers romanesque inspire à Collins l’intrigue de son premier chef-d’oeuvre: La Dame en Blanc, publié d'abord en feuilleton dans All the Year Round de novembre 1859 à octobre 1860.
 
A l’instar de Arthur Conan Doyle quelques années plus tard le succès de Wilkie Collins ne naîtra pas de romans; c'est par le biais de feuilletons écrits pour la presse qu'il conquiert un large public, séduit par la Sensation novel. Ces récits, publiés dans les journaux bon marché, où le monde de l'amour et des beaux sentiments se heurte au mal, où le surnaturel côtoie le crime le plus sanglant, tout cela dans une Angleterre contemporaine et terriblement insulaire. Il faut dire que le thème du crime est "à la mode". Il sous-tend la littérature et le théâtre de cette époque victorienne qui fut selon les mots de Georges Orwell «notre grand âge du crime, sa période élisabéthaine pour ainsi dire».
 
Mais, se détachant de l’inspiration «Gothic» chère à ses prédécesseurs, Wilkie Collins place le réalisme au service du suspense. Ses romans ténébreux ont pour décor une Angleterre familière à ses lecteurs. Celle du 19ème siècle, celle de la bonne société victorienne et de ses hypocrisies mais aussi celle des nébuleuses urbaines aux bas-fonds menaçants. Il parsème ses intrigues, souvent inspirées de crimes célèbres, d’indices quotidiens: une jeune femme aperçue dans l'omnibus, le méchant grand amateur de thé, les becs de gaz des voies sans issues... A l’intérieur de récits imbriqués en poupées gigognes, il remet au goût du jour la fonction narrative à la première personne. Le témoignage littéraire et judiciaire. Un développement dramatique qui le placera comme un des initiateur du roman moderne comme en témoigne François Rivière:"... Mais il y a d'abord la construction remarquable de La Dame en blanc, sa structure qui nous ramène à la fascination de l'auteur pour les procès et de l'astucieux profit qu'il fait de l'enchaînement des témoignages... Collins monte sa fiction de façon cinématographique avant la lettre, par souci à la fois de lisibilité et d'ambiguïté. L'intrigue... est poussée à bout et enveloppée d'une thématique... engendrée... par la vie même de l'auteur, en ses plus secrets fantasmes. La disposition même du récit, amorcé par X., repris par Y., amendé par Z., mis comme entre parenthèses pour mieux assoiffer le lecteur,... permet l'effet dont parle Borges: les protagonistes, qui ressemblent à des témoins déposant à la barre, décrivent une action seulement visible pour nous en pointillés, de loin, mais perçue par des caractères qui façonnent et refaçonnent sans cesse la matière même de la fiction."
 
Le public ne s’y est pas trompé. De novembre 1859 à octobre 1860, le succès est énorme, la foule s’arrache chaque livraison, pressée de connaître le secret de la Dame en blanc. Des paris sont lancés. L’hystérie est telle que Wilkie Collins lui même s’en étonne «Les personnages, quels que soient les défauts que la critique leur puisse d'ailleurs reprocher, --- avaient la bonne fortune de produire, sur le grand nombre des lecteurs, la même impression que de vivantes réalités. Les deux rôles de femme par exemple (Laura et miss Halcombe), s'étaient faits de si chauds amis que, lorsqu'une crise du roman parut les menacer l'une et l'autre de quelque sinistre aventure, je reçus plusieurs lettres écrites sur le ton le plus sérieux, pour me supplier de leur sauver la vie!» Les trois volumes de l'édition en librairie, publiés en novembre 1860, s'arracheront en quelques jours.
 
Désormais à l’abri du besoin, Collins abandonne All The Year Round pour se consacrer entièrement à l’écriture. Les romans qui suivront (No Name 1862, Armadale, 1866) confirmeront son talent de conteur jusqu’à la parution de The Moonstone (La pierre de Lune) en 1868; chef-d’oeuvre de complexité et de subtilité psychologique inspiré de l’affaire Constance Kent, jeune fille de 13 ans qui avait assassiné son frère en juin 1861. Délivré en feuilleton, The Moonstone connaîtra un succès comparable à celui de La Dame en Blanc; au point dit-on d’inspirer fortement Charles Dickens pour son roman inachevé The Mystery of Edwin Drood.
 
Epuisé par ses crises nerveuses et par l’abus de laudanum, Wilkie Collins se retire peu à peu de la scène publique pour terminer sa vie en reclus, rapidement délaissé par une critique condescendante.
 
Vingt ans plus tard, Arthur Conan Doyle lui rendra indirectement hommage en nous racontant les exploits d'un personnage typiquement «collinsien»; un détective bien sûr, cocaïnomane, presque cynique, mais surtout amoureux de la logique et de la vérité: un certain Sherlock Holmes...
 
Sandrine Sénéchal
 
 
 
 
 

 
1843 - The Last Stage Coachman (nouvelle)
1848 - Memoirs of the Life of William Collins, Esq., RA. (biographie)
1850 - Antonina: or the Fall of Rome
1851 - Rambles Beyond Railways: or, Notes in Cornwall Taken A-Foot (récit de voyage)
1851 - The Twin Sisters (nouvelle)
1852 - Mr. Wray's Cash Box: or The Mask and the Mystery
1852 - Mr Wray's Cash Box
1852 - Basil: A Story of Modern Life
1852 - A Terribly Strange Bed (nouvelle)
1852 - A Passage in the Life of Perrugino Potts (nouvelle)
1852 - Nine O'Clock (nouvelle)
1853 - Gabriel's Marriage (nouvelle)
1854 - Hide and Seek
1854 - A Stolen Letter (nouvelle)
1855 - The Yellow Mask
1855 - The Lady of Glenwith Grange (nouvelle)
1855 - Sister Rose (nouvelle)
1855 - Monkton le Fou (Mad Monkton, nouvelle)
1855 - The Dream Woman (nouvelle)
1856 - After Dark
1856 - Anne Rodway (nouvelle)
1857 - The Dead Secret
1857 - The Frozen Deep
1857 - A Fair Penitent (nouvelle)
1857 - The Black Cottage (nouvelle)
1857 - The Dead Hand (nouvelle)
1857 - The Family Secret (nouvelle)
1858 - The Biter Bit (nouvelle)
1858 - A Plot in Private Life (nouvelle)
1858 - Fauntleroy (nouvelle)
1859 - Blow up with the Brig (nouvelle)
1859 - The Queen of Hearts
1859 - The Parson's Scruple (nouvelle)
1860 - La dame en blanc (The Woman in White)
1861 - The Cauldron of Oil (nouvelle)
1861 - The Fatal Cradle
1862 - Sans Nom (No Name)
1863 - My Miscellanies
1866 - Armadale
1867 - No Thoroughfare
1868 - Pierre de Lune (The Moonstone)
1870 - Man and Wife
1872 - Poor Miss Finch
1873 - The New Magdalen
1873 - Miss or Mrs And Other Stories in Outline
1874 - The Frozen Deep and Other Tales
1874 - John Jago's Ghost (nouvelle)
1874 - Fatal Fortune (nouvelle)
1875 - Seule contre la loi (The Law and The Lady)
1875 - Miss Jeromette and the Clergyman (nouvelle)
1876 - The Two Destinies
1876 - Mr Captain and the Nymph (nouvelle)
1877 - Miss Bertha and the Yankee (nouvelle)
1877 - Mr Percy and the Prophet (nouvelle)
1878 - L'Hôtel Hanté (The Haunted Hotel)
1878 - Miss Mina and the Groom (nouvelle)
1878 - Mr Marmaduke and the Minister (nouvelle)
1879 - A Rogue's Life
1879 - The Fallen Leaves, First Series
1879 - My Lady's Money
1879 - Mrs Zant and the Ghost (nouvelle)
1879 - The Devil's Spectacles (nouvelle)
1880 - Jezebel's Daughter
1881 - The Black Robe
1881 - Miss Morris and the Stranger (nouvelle)
1881 - Mr Cosway and the Landlady (nouvelle)
1881 - Qui a tué Zebedee? (Who killed Zebedee?)
1882 - Fye! Fye! or the Fair Physician (nouvelle)
1883 - Heart and Science
1883 - Mr Lismore and the Widow (nouvelle)
1884 - Mr Lepel and the Housekeeper (nouvelle)
1884 - Mr Medhurst and the Princess (nouvelle)
1884 - 'I Say No'. or The Love Letter Answered
1885 - The Poetry Did it (nouvelle)
1886 - The Evil Genius
1886 - The Guilty River
1886 - A Sad and Brave Life (nouvelle)
1886 - Farmer Fairweather (nouvelle)
1886 - Miss Dulane and My Lord (nouvelle)
1887 - Little Novels (recueil)
1889 - The Legacy of Cain
1890 - Blind Love
1890 - The Lazy Tour of Two Idle Apprentices
 
 
 
 
 

 
- Préface de Wilkie Collins à La Dame en Blanc
- "Men of the Day", caricature de Wilkie Collins (Vanity Fair, 1872, Adriano Cecioni)
 
 
 
 
 

 
- Bibliographie (très) sélective commentée (en français)
 
- Textes disponibles sur le web (en anglais)
 
- Wilkie Collins appreciation page (en anglais)
 
- Victorian Sensationalism Online (en anglais)